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Syndrome du Mâle Irritable

Pour définir le mal-être qui ronge certains hommes, cette étiquette devient très à la mode. Que signifie-t-elle exactement ? Qu'implique-t-elle ? A quoi devrions-nous rester vigilants ?

Qu’est-ce que le syndrome du mâle irritable ? On emploie généralement cette étiquette pour désigner un groupe de symptômes éprouvés par de nombreux hommes lors d’une diminution importante de leur taux de testostérone, notamment en période d’andropause ou à la suite d’un épisode particulièrement stressant.

Aucune définition de ce syndrome n’a trouvé de consensus scientifique à l’heure actuelle. Utiliser ce terme parapluie nous offre néanmoins la possibilité d’évoquer de manière succincte un large panel de bouleversements physiques et psychologiques associés à ces fluctuations hormonales, tels que l’irritabilité, l’hypersensibilité, les sautes d’humeur, la baisse d’énergie, la perte d’appétit, la perte de masse musculaire, l’augmentation des tissus adipeux, les
dysfonctionnements érectiles, la chute du désir sexuel, les bouffées de chaleurs, la perte d’estime de soi, l’anxiété, la dépression, les difficultés de concentration, etc.

Comment expliquer ces fluctuations hormonales ? Qu’est-ce que cela implique concrètement ?

Le flux des sécrétions hormonales varie naturellement tout au long de la journée, des saisons ou du cycle de la vie. La testostérone est l’hormone androgène la plus importante chez l’homme. Elle joue un rôle déterminant dans sa fonction sexuelle, dans son état de forme général et dans son sentiment de bien-être.

Concrètement, l’intervention de la testostérone en périodeintra-utérine induit le développement des organes génitaux masculins. Plus tard, à l’adolescence, elle participe à l’émergence de la libido et des caractères sexuels secondaires masculins : la pilosité plus importante (surtout sur le torse, le dos et le visage), la prise de masse musculaire, la densité
osseuse, la voix grave, la fabrication des spermatozoïdes, la croissance du pénis, etc.

On observe un pic de sécrétion de testostérone entre 20 et 30 ans, suivi d’une diminution progressive du taux dans le sang d’environ 10% par décennie. Il s’agit du processus normal de vieillissement, cela concerne tous les hommes. Par contre, tous les hommes ne sont pas destinés à présenter les symptômes d’un SMI à l’approche de la cinquantaine. Pour certains,
l’évolution sera lente et discrète. Pour d’autres, une crise émotionnelle et identitaire se manifestera de façon remarquable.

Des solutions médicamenteuses à base de testostérone existent, cependant elles ne sont pas toujours appropriées puisqu’elles comportent un certain nombre de risques. Votre médecin réalisera un prélèvement sanguin pour déterminer l’origine de vos symptômes et vous aiguillera vers un traitement optimal, si nécessaire.

Autrement … La recette miracle pour optimiser son bien-être,on la connait. Comme pour beaucoup d’autres difficultés, une bonne hygiène de vie reste l’ultime garde-fou. La meilleure médication, c’est la prévention. A titre de liste non-exhaustive, des études démontrent les effets protecteurs de nos habitudes contre une baisse brutale et pénible du taux testostérone :
pratique régulière d’exercices physiques, sommeil réparateur, activités de relaxation (comme le yoga, sophrologie, méditation,…), alimentation équilibrée et riche en oméga-3, vitamines, zinc, potassium, protéines et acides gras saturés, diminution de la consommation d’alcool, élimination des perturbateurs endocriniens (parabènes, pesticides,…).

Pourquoi s’agit-il d’un syndrome qui n’est pas reconnu comme entité diagnostique aux yeux de la science? En quoi peut-il être discuté?

Deux grandes limites entravent les recherches et la validation scientifique de cette étiquette.

Avant tout, le diagnostic de SMI ne se suffit pas à lui-même pour proposer aux patients une intervention adéquate. Ce syndrome recouvre une variété de maux que l’on parvient à diagnostiquer de manière bien plus spécifique : andropause, hypogonadisme, stress ? Les professionnels de la santé tendent à préciser encore et toujours plus les contours multifactoriels des souffrances dont les patients se plaignent, que ce soit en conditions cliniques ou normales. L’utilisation d’une étiquette passe-partout s’inscrit donc à contre-courant de cet objectif d’exactitude, bien qu’elle trouve son utilité dans la formule… Lorsqu’on mentionne un SMI, on se comprend rapidement sur l’ensemble des symptômes concernés.

La deuxième raison pour laquelle cette appellation ne rencontre pas toujours un public des plus enthousiastes est qu’elle soulève un tabou. On parle de ‘’syndrome’’ à partir du moment où ces altérations affectent les individus au-delà de la norme … Mais quelle est la norme ? Nous avons à peine le temps de poser cette question qu’une armée de dictats s’invite dans
le débat : les fluctuations hormonales sont une ‘’faiblesse’’ dont l’homme ‘’normal’’ ne peut souffrir. Nous nous affranchissons difficilement des injonctions utopistes qui pèsent sur les épaules masculines. L’imaginaire collectif refuse volontiers aux hommes la possibilité de vivre une instabilité émotionnelle, pas sans l’ériger en pathologie. Dans ce contexte, le risque
existe d’utiliser l’étiquette du SMI à tort et à travers et de stigmatiser des processus biologiques absolument normaux et naturels.

Quel est le danger de ce stigmate ? Comment s’en protéger ?

Pour correspondre au modèle ‘’viril et puissant’’, l’homme est tenu de filtrer ses ressentis, de les refouler, de les voir comme des ennemis. Cette pression sociale vers une pseudo-norme ne fait que renforcer le poids psychologique de leur maux.

De plus, le champ lexical associé au ’’syndrome’’ raconte une histoire victimaire selon laquelle ces variations proviennent d’un problème, d’une anomalie, d’un coup du sort, comme une forme de plaidoyer en faveur de celui qui se pense fragile. Le piège de se considérer comme le jouet de la malchance est qu’on peut facilement se noyer dans un sentiment
d’impuissance, et manquer les pistes d’évolution qui s’offrent à nous.

Nous ne pouvons pas tout contrôler. Nous ne pouvons pas supprimer la souffrance endurée. Mais nous pouvons toujours choisir notre manière d’y réagir : Quelle sera ma réponse ? Que vais-je décider de faire face à cette situation, si douloureuse soit-elle ?

Une personne qui accepte les évolutions dans sa corporalité n’est pas faible, elle est au paroxysme de son humanité et de son intelligence. Retrouver sa puissance et sa liberté commence par une étape primordiale : accueillir ses ressentis physiques et émotionnels, sans jugement ni résistance. On ose enfin verbaliser et répondre à ses besoins réels, plutôt qu’au modèle de l’homme ‘’idéal’’ qui est censé traquer et éradiquer la qualité de présence à
lui-même et aux limites de son corps. Quand on se laisse guider par les variations sans les craindre, sans les enfermer sous contraintes sociales, on invite en nous un état de grâce.

Pour en parler, n'héstitez pas à prendre contact.